Le fond de la bouteille
Simenon
Un polar qui n’en est pas un, plutôt une ambiance glauque, visqueuse et collante.
Une écriture différente des Maigret, plutôt détachée, comme en observation d’un phénomène.
Simenon nous emmène aux Etats-Unis. Le livre s’ouvre sur le quotidien d’une bande de voisins, cuvant à la bière, de week-end en week-end, de maison en maison, leur mal de vivre.
Comme la rivière voisine qui déborde et envahit le canyon, le passé resurgit dans la vie du héros avec l’arrivée de son ex-taulard de frère. Comment se débarrasser de cet « inconnu », faire passer pour faux quelque chose qui est vrai, alors que l’environnement lui-même vit dans le faux-fuyant ?
Cette question, Simenon se la pose à lui-même : comment se débarrasser d’un frère, son frère que sa mère lui a préféré ? Son frère, à qui il a suggéré, après quelques mauvais coups, de s’engager dans la légion étrangère et qui y est mort ? Cette mort dont sa mère l’a rendu coupable…
Dans «Maigret aux assises », il plaide pour l’assassin dans le box : il n’est plus le même homme que celui qui a commis l’acte. Dans « Le fond de la bouteille », il plaide pour un autre regard sur l’homme qu’il est devenu. « Un raccommodeur de destinée » disait de lui sa seconde épouse. Est-ce avec la sienne qu’il a voulu se raccommoder ?