La proposition de Ségolène Royale d’un mode de gouvernance qui reconnaît et mobilise l’expertise des citoyens est aux antipodes du populisme et de la démocratie d’opinion. Valoriser l’expertise citoyenne, le « citoyen expert » c’est agir concrètement pour prévenir les dérives populistes
La démarche politique du « citoyen expert » dépasse la seule expression de mécontentement, la simple « réaction » de sanction (attitude réactionnaire au sens strict du terme), la « déselection » comme la nomme Pierre ROSANVALLON dans son dernier ouvrage ou il analyse les dérives possibles des phénomènes de « contre démocratie » à une période ou « L’idéal démocratique règne désormais sans partage, mais où les régimes qui s’en réclament suscitent partout de vives critiques ».
S'il exerce son sens critique et ne s'interdit pas de brandir son pouvoir de véto, le citoyen expert fait d’autant plus confiance à ceux qu’il a choisi d’élire que ceux-ci l’associent au contrôle et à l’évaluation des politiques qu’ils proposent et conduisent…, mieux l’associent au diagnostic, écoutent, prennent au sérieux ses attentes, mobilisent ses idées sur les solutions aux problèmes qu’il soulève.
Comme toute expertise, l’expertise citoyenne est une construction. Fondée sur l’expérience quotidienne, ancrée dans le réel (social, économique, culturel…) elle suppose néanmoins une démarche d’élaboration des connaissances, de confrontation et d'intégration des savoirs. En cela, le projet de valorisation de l’expertise citoyenne rejoint l’idéal et la pratique du mouvement de l’éducation populaire et permanente.
Le projet de l’éducation populaire est fortement enraciné dans la tradition et la culture de la gauche française depuis 45, et plus largement celle des mouvances progressistes qu'elles soient d'inspiration laïques ou chrétienne.
L’éducation populaire propose des méthodes pour élaborer l’expertise, fonder la connaissance à partir de la pratique : il en est ainsi par exemple de la "démarche de l’entrainement mental", formalisée par S.Moscovici et J. Dumazedier au sein de l’association Peuple et Culture. (Méthode dont on retrouve de nombreuses variantes en œuvre au sein d’autres mouvement d’éducation populaire : Culture et Liberté, Culture et Promotion, Le MRJC, la Joc, les MJC, Léo Lagrange qui ont formé de nombreux militants politiques, associatifs, syndicaux….). Voir, Comprendre, Agir tel est le processus de l’entraînement mental : Voir c’est à dire écouter, observer, décrire, contrôler, évaluer, diagnostiquer ; Comprendre c’est à dire analyser, synthétiser, éclairer par les connaissances, rechercher les causes, identifier les conséquences ; Agir c’est à dire proposer, revendiquer, élaborer, concevoir des solutions, essayer, tester, décider…
Ségolène Royale met au cœur de son projet l’éducation et la formation. Au delà de la simple adaptation permanente des compétences professionnelles (nécessaire mais non suffisante et qui constituera sans doute aussi une partie du projet de Nicolas Sarkozy) le projet de la gauche pour la formation devra renouer avec les ambitions de l’éducation populaire et permanente dont la finalité est la formation et la promotion de citoyens experts, compétents pour participer au jeu démocratique, au delà des élections…
Il conviendra pour cela que les politiques publiques de la formation, de l’éducation et de la culture renouent avec une vrai soutien aux associations de l’éducation populaire. Il faudra aussi que le mouvement syndical et les organisations politiques renforcent leur fonction éducative et culturelle de masse, hélas souvent délaissée.
Un mouvement associatif reconnu, soutenu qui, au delà de la prestation de service, valorise l’adhésion, la monté en compétence et la prise de responsabilité des adhérents. Des organisations syndicales et des partis politiques qui encouragent et facilitent l’adhésion et redeviennent de vrais écoles de démocratie participative…
Les commentaires récents